Jour 1 : Queige – Refuge du Lachat
Nous quittons Queige en milieu de matinée, sous une chaleur écrasante, pour entamer le Tour du Beaufortain. Le tracé officiel recommande sept étapes, mais portés par fougue de la jeunesse et en quête de défi, nous avons décidé de le réaliser en cinq jours.
Avec un sac de 15 kg sur le dos (conseil : essayez de ne pas dépasser 12–13 kg, sauf si vous êtes très entraîné, au-delà chaque pas devient lourd en montagne), je pars motivé sur ce parcours alpin réputé pour ses panoramas exceptionnels.
Cette première étape se résume principalement à une longue ascension forestière, mais elle nous offre déjà quelques aperçus prometteurs des paysages qui nous attendent. Et, compte tenu de la chaleur suffocante d’août, marcher à l’ombre des arbres est finalement une chance.

Nous atteignons le refuge du Lachat en début d’après-midi, après 4h20 de marche soutenue. Comme il n’ouvre qu’à 16h, nous profitons d’un transat pour grignoter nos casse-croûtes face au Mont-Blanc, majestueux au loin. À la tombée de la nuit, nous installons discrètement notre tente à 200 m du refuge, cachés derrière une pancarte sur un pont au-dessus de la route, le bivouac officiel étant situé vingt minutes plus loin.

Jour 2 : Refuge du Lachat – Refuge de la Croix du Bonhomme
C’est l’étape reine de notre trek : 31 km et près de 2000 m de dénivelé positif. Nous partons dès le petit-déjeuner pour affronter cette longue journée.

Les pâturages, peuplés de vaches, jalonnent notre progression, et nous traversons des sites splendides comme le col de la Fenêtre, dont le panorama surgit soudain entre deux rochers, tel un tableau encadré sur les Alpes.

Après cette descente, reste la dernière difficulté : l’ascension du col de la Croix du Bonhomme. Elle nous semble interminable, et la pluie s’invite pour corser l’effort. Éreintés mais fiers, nous atteignons enfin le refuge, après plus de neuf heures de marche.
Surprise à l’arrivée : la salle est bondée. Le refuge, situé à la croisée du Tour du Beaufortain et du très fréquenté Tour du Mont-Blanc, grouille de randonneurs. Entre le brouhaha multilingue et la douche froide chronométrée à quatre minutes, l’ambiance tranche avec la convivialité chaleureuse du refuge précédent. Ici, on se croirait davantage sur une aire d’autoroute que dans un refuge alpin.
Jour 3 : Refuge de la Croix du Bonhomme – Refuge de la Coire
Après une nuit pénible, la seule à 2500 m d’altitude, sur un sol mal plat, nous repartons courbaturés pour cette troisième journée. Les jambes sont lourdes, chaque montée paraît plus raide qu’à l’accoutumée.
Le début de l’étape, sur les crêtes, nous gratifie d’une vue splendide sur le refuge que nous venons de quitter. Mais rapidement, le brouillard s’installe et nous accompagnera presque toute la journée.

Les descentes deviennent douloureuses et, faute de visibilité, nos efforts ne sont récompensés par aucun panorama. Même le lac d’Amour, pourtant réputé comme l’un des joyaux du Beaufortain, nous échappe : nous passons à quelques mètres sans le voir, tant la brume est épaisse.

Trempés par la pluie, nous atteignons le refuge de la Coire où, par chance, deux couchages se libèrent dans l’annexe située à quelques minutes de marche. L’accueil chaleureux, une excellente croziflette et la perspective d’une bonne nuit au sec finissent par nous redonner le moral.
Jour 4 : Refuge de la Coire – Refuge des Arolles
68 km et 4300 m de dénivelé positif en trois jours : le bilan est déjà lourd, et nos jambes le ressentent. Place désormais aux étapes les moins exigeantes.

Au programme : 14 km et 750 m de montée. À côté des journées précédentes, cela ressemble presque à un jour de repos. Mais le temps, toujours capricieux, assombrit le parcours et rend les derniers kilomètres jusqu’au refuge interminables.
Nous arrivons néanmoins en début d’après-midi, assez tôt pour poser nos sacs et profiter d’un peu de repos. Le soir, l’ambiance se réchauffe autour de discussions avec d’autres randonneurs : chacun partage ses anecdotes, ses difficultés et ses émerveillements.
Jour 5 : Refuge des Arolles – Queige
Le dernier jour nous inquiète un peu : la descente jusqu’à Queige pourrait s’annoncer rude. Finalement, elle se révèle plus douce que prévu.
Au sommet du col des Lacs, nous savourons la dernière montée de notre périple. Puis nous entamons la descente, ponctuée d’une pause déjeuner, avant de rejoindre notre point de départ à 13h30.

Ironie du sort : après trois jours et demi de grisaille, le soleil refait surface… au moment même où nous achevons le trek.
Malgré une météo souvent contrariante, nous repartons comblés par ces cinq jours d’aventure alpine, riches en efforts, en paysages, et en souvenirs.